En faisant de la santé mentale la grande cause nationale, les pouvoirs publics ont envoyé en 2025 un signal fort : le sujet n’est plus marginal, ni réservé aux situations d’urgence. Il concerne l’ensemble de la société, et le monde du travail en est l’un des premiers terrains d’expression.
La santé et le bien-être au travail s’imposent au cœur des discussion RH et managériales, révélant à la fois des avancées réelles ainsi que des limites encore très présentes.
Après plusieurs années marquées par des transformations profondes des modes de travail, une chose est désormais claire : le bien-être des collaborateurs n’est pas qu’une question d’image. Il est directement lié à l’engagement, à la performance collective.
Pour autant, entre avancées concrètes et transformations encore inachevées, que nous apprend réellement l’année 2025 sur la manière dont les entreprises abordent ces enjeux ?
Constat santé et bien-être au travail 2025
Premier constat confirmé en 2025 : la santé mentale n’est plus un tabou en entreprise. D’après le baromètre Qualisocial, plus de 70 % des salariés estiment que la santé mentale est aujourd’hui un sujet légitime dans leur organisation. Cette évolution est en grande partie liée à la reconnaissance institutionnelle du sujet et à une médiatisation accrue des risques psychosociaux.
Mais cette visibilité accrue ne signifie pas amélioration globale de la situation. Toujours selon Qualisocial et Empreinte Humaine, près de 40 % des salariés se déclarent en situation de fatigue mentale élevée, et environ 1 salarié sur 5 présente un risque d’épuisement professionnel. Ces chiffres rappellent que parler du sujet ne suffit pas à le résoudre.
2025 a également confirmé que le bien-être ne se résume pas à des dispositifs périphériques. Les travaux de l’ANACT soulignent que les principaux facteurs de dégradation de la santé mentale sont liés à l’organisation du travail : charge excessive, manque de clarté sur les priorités, interruptions permanentes, faible autonomie et déficit de reconnaissance.
Autrement dit, la santé des collaborateurs agit comme un thermomètre du fonctionnement global de l’entreprise.
Les pratiques de bien-être au travail qui ont fonctionnées en 2025
Les données montrent néanmoins que certaines approches ont produit des effets tangibles. Les entreprises ayant enregistré une amélioration du climat social sont celles qui ont privilégié des actions régulières et structurantes, plutôt que des initiatives ponctuelles.
Selon l’ANACT, les démarches les plus efficaces reposent sur :
- l’analyse réelle de la charge de travail,
- la clarification des rôles et des priorités,
- l’ajustement des objectifs en période de tension,
- et l’implication des équipes dans les solutions mises en place.
Le rôle des managers de proximité s’est révélé déterminant. D’après une étude OpinionWay / Empreinte Humaine, les salariés dont le manager est formé aux enjeux de santé mentale déclarent un niveau de stress significativement plus faible et un sentiment de soutien plus élevé. À l’inverse, l’absence de relais managérial reste l’un des principaux facteurs de dégradation du bien-être.
Enfin, les initiatives favorisant le mouvement, par le biais d‘ateliers de bien-être, ou d’activités sportives qui favorisent le lien collectif ont montré un impact positif, notamment sur l’engagement et le sentiment d’appartenance. Sans résoudre à elles seules les problématiques structurelles, elles contribuent à créer un environnement de travail plus agréable.
Santé mentale au travail : les limites et erreurs fréquentes
Malgré ces avancées il y a des limites persistantes. De nombreuses entreprises continuent d’aborder le bien-être au travail comme une superposition d’actions déconnectées de l’organisation réelle du travail. Cette approche est souvent perçue comme cosmétique par les collaborateurs.
Le baromètre Malakoff Humanis révèle que plus de 50 % des salariés estiment que les actions de bien-être mises en place ne compensent pas une charge de travail excessive. Ce décalage alimente une forme de défiance et peut même renforcer le sentiment de mal-être. Par exemple, certaines entreprises complètent leur dispositif QVT par des actions ciblées de prévention (formation gestion charge mentale, espaces de paroles encadrés…)
Autre limite fréquemment observée : l’absence de suivi. Peu d’entreprises mesurent réellement l’impact de leurs actions sur des indicateurs clés comme l’absentéisme, le turnover, l’engagement ou la satisfaction des équipes. Sans pilotage, le bien-être reste un sujet d’intention plus que de transformation. Certaines organisations ont intégré le bien-être et la santé mentale à leurs indicateurs RH, en suivant des données comme l’absentéisme, le turnover, l’engagement…
Les priorités 2026 des entreprises pour la prévention et la santé
Les enseignements de 2025 convergent vers un message clair : la prévention doit devenir centrale. L’INRS rappelle que les actions les plus efficaces sont celles menées en amont, avant l’apparition de situations de rupture.
En 2026, les priorités identifiées par l’ANACT et les experts RH sont claires :
- repenser les rythmes de travail,
- limiter la surcharge informationnelle,
- redonner de la lisibilité aux priorités,
- et renforcer l’autonomie des équipes.
Le soutien aux managers restera un enjeu clé. Sans formation ni marges de manœuvre, ils ne peuvent jouer pleinement leur rôle de prévention. La santé mentale au travail est avant tout une responsabilité collective, qui engage l’organisation dans son ensemble.
En faisant de la santé mentale une grande cause nationale, 2025 a posé un cadre fort. Les entreprises ont avancé, parfois timidement, parfois de manière plus structurée. Les chiffres montrent cependant que la fatigue et le stress restent largement présents.
Le véritable défi pour 2026 ne sera pas de multiplier les initiatives, mais de transformer en profondeur les modes de travail. Faire moins, mais mieux. Placer la santé et le bien-être au cœur de l’organisation, et non en périphérie.
C’est à ce prix que le bien-être au travail pourra devenir un levier durable, et non un simple sujet de communication.